Café Littéraire du 12 février 2019 – Actualités
Notre ami et fidèle membre du Café Littéraire, Jean Pierre Lecoq nous a quittés fin janvier … quelques jours après l’écrivain Eric Holder, auteur de nouvelles et romans, notamment de Mademoiselle Chambon, La Saison des Bijoux, présent à Cita’Livres en 2016 ; or, Jean Pierre L. avait animé la rencontre à la Médiathèque de St Pierre.
Lors du Festival de la BD à Angoulême, la meilleure distinction, le Fauve d’Or, a été attribuée à Emil Ferris pour son roman graphique Moi, ce que j’aime, c’est les monstres que nous avions découvert lors de la séance d’octobre 2018.
Agenda
Nous nous retrouverons le 19 mars 2019 pour lire Bakhita (2017, Livre de Poche) de Véronique Olmi, Présidente d’honneur du prochain salon Cita’Livres (27-28 avril 2019).
La Médiathèque de St Pierre accueillera Marie Hélène Lafon, le vendredi 8 mars à 19h (inscription indispensable).
On a lu ou on va lire
Les Fils de la Poussière de l’incontournable auteur Islandais Arnaldur Indridason, pour découvrir, si ce n’est déjà fait, les subtilités du polar nordique.
Retour à Lemberg (East West Street. On the Origins of Genocide and Crimes against Humanity) de Philippe Sands, avocat franco-britannique et professeur de droit international (Albin Michel, 2017).
L’Hiver du mécontentement de Thomas B. Reverdy, Prix Interallié 2018 (Flammarion, 2018) : à Londres, au cours de l’hiver 1978-1979 qui a précédé l’arrivée au pouvoir de Margaret Thatcher, la grogne monte…
Idiss de Robert Badinter (Fayard, 2018) retrace le destin de sa grand-mère qui fuit l’empire tsariste pour se réfugier à Paris en 1912.
On reparlera probablement du dernier Erri de Luca, Le Tour de L’oie (Gallimard, 2019).
Les Nouvelles de Tchékhov
En s’appuyant sur la passionnante biographie Tchékhov de Virgil Tanase (Folio biographie, 2008), Anny évoque les éléments de la vie courte et dense de cet auteur russe, médecin, dont on connait souvent davantage les pièces de théâtre que les nouvelles, bien qu’il en ait publié plus de six cents.
Ce parcours biographique nous permet de voir à quel point sa vie et son œuvre sont complémentaires, dans les thèmes abordés comme dans la subtilité de l’écriture si particulière de la nouvelle qui sait «prendre de la distance avec la réalité».
Si Tchékhov croque des personnages, des situations, y compris les plus insolites, des mœurs, et bien sûr des amours, il ne juge pas, il donne à voir avec lucidité. Difficile de lister ici ce que nos lectures nous ont fait découvrir de cette société russe de la fin du XIXème siècle dans toute sa diversité et sa complexité. Outre le recueil des quinze sur le Royaume des femmes, on évoque aussi d’autres nouvelles, la plus terrifiante Envie de dormir ou celle qui serait la préférée de l’auteur L’Etudiant.
Le recueil que nous avons retenu a emprunté son titre à la dernière, La Dame au Petit Chien, peut-être la plus subtile et la plus représentative de cette plume qui suggère plus qu’elle ne dit, une nouvelle écrite lorsque Tchékhov se savait très malade et «ses cheveux commençaient déjà à grisonner». Le volume contient aussi celle que préférait Tolstoï, Douchetchka. Ces nouvelles apparaîtront comme très modernes, notamment dans la liberté de ces femmes qui voyagent, expriment leur avis, voire mentent allégrement, dans la justesse acérée de ces portraits de princesse, cigale ou garces. Elles pourront au contraire sembler parfaitement désuètes dans la soumission acceptée ou le terrible ennui qu’apporte le mariage «avec un vieux qui donne la première place à la religion et à la morale». Ces nouvelles semblent à l’aune du désenchantement de l’auteur, de son impossibilité d’aimer. La lecture de courts passages en témoigne : «Quand des Russes se rencontrent, ils ne parlent que de sujets élevés et de femmes /…/ nous sommes insatisfaits, nos espérances sont brisées, nous souffrons», ou encore «Le temps passait, amenant d’autres rencontres, d’autres liaisons, d’autres ruptures mais jamais il n’avait aimé». On y trouvera tantôt une infinie tristesse, tantôt quelque bouffée d’humour « il faut élever la femme de façon qu’elle sache comme l’homme reconnaître ses torts, car à l’en croire, elle a toujours raison ». Au final, cette lecture partagée souligne, si besoin était, le plaisir de s’arrêter sur tel ou tel tableau pour en déguster l’admirable simplicité.
On évoque pour finir le film Gorki-Tchekhov 1900 de Fabrice Cazeneuve tourné dans l’île d’Oléron (2017) qui met en scène la correspondance entre Maxime Gorki et Anton Tchekhov.